lundi 13 mai 2024

Le soulèvement des pigeons - Jesse Miller

Le soulèvement des pigeons - Jesse Miller

Une dystopie classique, dans la veine du Meilleur des mondes et d'Un bonheur insoutenable : tout le monde a ce qu'il faut pour vivre bien, mais la vie est très chiante sans liberté. Dans un Harlem futuriste, la population noire est parquée et traitée fort humainement, en un sens — mais bel et bien parquée. C'est très bref, ça fait moins de 100 pages, et l'auteur n'a pas le temps de prendre son temps : une petite émeute lancée par un pas content, et voilà nos quelques protagonistes projetés de l'autre côté du miroir.

Je m'interroge quand je lis, notamment en quatrième de couverture, que ce texte parlerait de « racisme systémique », puisque si l'oppression est bien racialisée, si je comprends bien — ce que je ne garantis pas car le texte manque de clarté sur le fond de l'affaire — il n'y pas de blancs qui oppressent des noirs, ou inversement : c'est juste que dans cette société de l'abondance, il n'y a quasiment plus besoin de travailler, alors des systèmes d'organisation sociale arbitrairement rigoureux ont été mis en place pour compenser cette destructuration du tissu social causée par la technique. Il y a des communautés blanches qui vivent exactement la même oppression artificielle que les noirs de Harlem, mais eux, blancs, artificiellement oppressés par des noirs. Pourquoi cette organisation est-elle arbitrairement racialisée ? Mystère. En fait, l'histoire marcherait exactement de la même façon s'il n'était pas question de couleur de peau : le racisme est un simple thème et non un pivot narratif.

De l'autre côté du miroir, il y a les rebelles créatifs, qui, ne pouvant se satisfaire de la passivité offerte par la fausse utopie, sont convertis et employés à être les cadres et gardiens du système — c'est un job stimulant. C'est un twist familier dont j'apprécie néanmoins le fond nihiliste : il n'y pas de méchant leader ni même de véritable système tout-puissant : l'oppressé devient l'oppresseur, avec le sourire et sans transition, parce qu'il n'y a rien de mieux à faire. Et la vie de l'oppresseur n'a pas non plus l'air de faire rêver, mais difficile à dire tant le récit est expéditif. C'est un texte trop bref et elliptique pour son propre bien, à la narration basique, mais il y a quand même suffisamment de chair pour y planter ses dents.

jeudi 9 mai 2024

La Légion de l'espace - Jack Williamson

La Légion de l'espace - Jack Williamson

La Légion de l'espace de Jack Williamson, un vieux classique, à priori, paru en 1937. Vieux plus que classique, peut-être : j'ai eu l'impression de faire de l'archéologie littéraire tant c'est incroyablement archaïque et désuet.

Le héros, tout beau tout parfait, se trouve quelques comparses pour sauver le monde, flinguer les aliens, combattre les vils traitres, et, bien sûr, choper la princesse en détresse, seule femme du récit. Ici, on juge avec justesse le caractère moral des personnages au premier coup d'œil, via leur physique, et leurs personnalités pourrait difficilement être plus caricaturales. Les incohérences et les facilités narratives rempliraient une liste plus longue que le roman lui-même, qui d'ailleurs est peut-être composé à 10% des pénibles complaintes du perso qui sert théoriquement de touche comique. Nos héros font absolument n'importe quoi, il n'ont aucune notion d'auto-préservation et ils auraient dû mourir 100 fois.

Malgré tout ça je me suis enfilé les 300 pages sans trop me forcer (mais en sautant régulièrement des lignes). Il faut dire que c'est assez marrant tant c'est ridicule, et que l'aspect science-fictif parvient à vaguement intéresser une fois qu'on rencontre les aliens et, surtout, leur planète. Ces derniers font vraiment penser aux Anciens des Montagnes hallucinées de Lovecraft, paru quelques années auparavant : ce sont des gros machins qui volent et ont des tentacules, ils sont bien plus vieux que l'humanité et possèdent une science supérieure, ils vivent dans une cité démesurée à l'architecture hostile... J'ai du mal à croire à une simple coïncidence. J'ai bien aimé aussi que le grand méchant ne soit pas si simpliste (il change de côté au fil du récit) et le fait que Jack Williamson n'hésite pas à faire du maximalisme : l'humanité prend cher et les morts horribles se comptent par milliards. C'est un bon point ça. En somme, ça enrichit ma culture SF je suppose.

dimanche 5 mai 2024

Montée des Eaux - Pierre Lieutaghi

Montée des Eaux - Pierre Lieutaghi

Montée des Eaux de Pierre Lieutaghi, publié quelques mois avant la mort de l'auteur, dont j'avais lu, dans un autre genre, La Plante compagne. C'est un roman post-apocalyptique tout ce qu'il y a de plus classique dans son essence, mais avec un ton très optimiste, qu'on pourrait même qualifier d'utopique (la vie est quand même plus sympa après l'apocalypse et les enfants ne s'emmerdent plus à l'école). C'est bien écrit et c'est loin d'être bête, mais le fait est que je me suis très vite ennuyé, et ennuyé fort. J'ai scanné les pages, lisant un mot sur dix, tant ça m'a semblé vide et verbeux.

Les eaux montent et le village des Serres se retrouve isolé avec ses 200 habitants et quelques randonneurs. On s'organise, on met en commun, on résiste à une attaque de pillards, il y a un viol, et un vieux qui a du diabète. On ramasse des champignons, on retape le moulin et on va à la néo-messe. Il ne se pas grand-chose de plus, vraiment. Bien sûr, ce n'est pas un mal en soi, et je comptais sur les talents de l'auteur en botanique pour venir épicer tout ça. Hélas, cet aspect du roman est extrêmement décevant.

L'un des deux narrateurs est herboriste, et il ramasse quelques plantes, fait des tisanes, des pommades et des teintures-mères. Même un peu d'homéopathie, je vous jure. Il donne quelques conseils sur l'alimentation : ramasser les glands, les cynorrhodons, etc. On ne va pas plus loin. L'auteur évoque le début d'une réappropriation paysanne du territoire, il mentionne des semis de céréales, les élevages, mais ça ne dépasse pas le stade de l'évocation. C'est d'autant plus frappant que le roman ne dure que trois mois ! On ne voit même pas le village traverser l'hiver : tout l'aspect survie de la communauté semble beaucoup trop facile et sans aucune profondeur, et l'aspect paysannerie à long terme, qui aurait donné au roman un angle unique, est globalement absent. Au lieu de tels développements on a droit aux bavardages incessants et insignifiants de nos deux narrateurs, qui occupent l'essentiel du texte.

mardi 30 avril 2024

Le Semainier - Siméon Lerouge

Le Semainier - Siméon Lerouge

Exercice imprudent : 1) parler de poésie contemporaine, ce que je n'ai jamais osé sur ce petit blog, et 2),  parler du livre de quelqu'un que je connais, ce que je n'ai jamais fait non plus. Écrire sur la poésie d'un ami ! Quelle idée. On ferait mieux de pailler ses pruniers. J'ai une excuse : je ne lis pas les textes de Siméon parce que je le connais, mais je le connais parce que je lis ses textes.

Le Semainier, c'est un vers de sept syllabes par jour, ce qui fait un septain par semaine, pendant un an. Un journal poétique mis en calligraphie. Forcément, les textes sont un peu légers, voire simplistes, en un sens : il s'agit de petites choses du quotidien, décrites succinctement, en quelques mots choisis. Ceci dit, cette simplicité n'est pas un échec de l'auteur : c'est le principe de base. Notons que c'est non rimé.

Une chose particulièrement difficile avec la poésie, surtout celle qui a un caractère autobiographique, intime, c'est de rendre cette intimité lisible, sensible, pertinente pour autrui. Il me semble que Siméon y parvient de plusieurs façons.

Le Semainier - Siméon Lerouge

Il y a le concept, auquel il se tient de bout en bout : un vers par jour. En conséquence, le temps est totalement compressé, déformé. Chaque petit poème, qui contient une semaine, semble souvent n'être qu'une journée, voire un simple moment : une destruction volontaire du poids de ce temps. Il n'y a pas d'existence à optimiser, pas d'agenda bien chargé, les jours s'envoleront dans tous les cas et ils sont traités comme les graines de pissenlit qu'ils sont : réguliers, diligemment formés, potentiellement fertiles, mais toujours transitoires et volatils.

Il y a la forme, celle de la calligraphie. J'apprécie cette volonté de ne pas se contenter du texte et mélanger les arts, poésie et calligraphie : leur assemblage les grandit tous les deux, d'autant plus quand on sait que Siméon fabrique sa propre encre à partir de gales de chêne. Toutes les deux ou trois semaines, il change de style calligraphique, et si je n'ai pas le vocabulaire précis pour décrire ces pirouettes stylistiques, ça crée une vraie curiosité de la page suivante. Certaines sont épurées, d'autres étoffées, et les plus réussies recueillent toute l'approbation de mon œil naïf.

Et il y a les poèmes eux-mêmes. Un quotidien tout simple, forcément banal, de jeune homme vaguement marginal et champêtre, hautement détaché et toujours obsédé par l'écriture. Je suis donc prédisposé à être bon client. J'apprécie quand certains vers plus aiguisés viennent suggérer des questions plus larges parmi ce quotidien des bocages, des rues embrumées, des ballades à vélo et du bureau d'écriture.

Siméon a d'autres projets en cours : un roman de SF dense et marrant, que je recommande chaudement, dont les deux premières parties sur trois sont disponibles librement, et une série de poèmes inspirée des Chants de Maldoror.

Le Semainier - Siméon Lerouge

vendredi 26 avril 2024

Axiomatique - Greg Egan

Axiomatique - Greg Egan

Axiomatique de Greg Egan, recueil de 18 nouvelles que j'avais déjà lu il y a, quoi, 12 ans ? J'en avais un excellent souvenir, mais un peu vague, bien que certaines des nouvelles ci-dessous soient parvenues à se graver durablement dans ma mémoire. Depuis, j'ai lu plusieurs de ses romans, et si certains sont décevants, les meilleurs sont brillants. Je n'ai pas l'impression d'avoir épuisé Greg Egan, c'est un des rares auteurs que j'ai activement envie de lire plus. Axiomatique maintient un niveau remarquable, et même les nouvelles les plus faibles ont une bonne raison d'exister.

L'assassin infini (4,5/5)

Un thème classique de Greg Egan, déjà exploré dans son roman Isolation : les univers parallèles. Ici, certains mutants ont la capacité de créer un vortex, un point dans l'espace où se rencontrent les univers parallèles. Le narrateur est chargé de naviguer dans cet environnement hostile pour éliminer la menace à la source. C'est avant tout un concept, une idée très visuelle, qui fonctionne : plus on avance dans le vortex, plus la réalité se délite, et l'identité risque de se déliter avec elle. En ce sens, ça m'a rappelé le classique français L'œil du purgatoire de Spitz. 

Lumière des évènements (4,5/5)

Je ne crois pas au libre arbitre, mais, inévitablement, je vis dans l'illusion du libre arbitre. Cette illusion me semble être une partie essentielle de la condition humaine, dans le sens où la conscience de soi ne peut pas être couplée à une parfaite conscience du déterminisme absolu. Pour utiliser un terme plus fort encore : la conscience est soi est incompatible avec une parfaite conscience du déterminisme absolu, et donc avec une parfaite conscience de la réalité, car l'idée du soi, l'impression d'être un individu, est inséparable de la perception d'un futur flou. Toute l'évolution de la psychologie du vivant est justement orientée vers la maximisation des chances de reproduction des gènes de l'individu dans ce futur flou. L'individu est la girouette qui à chaque instant l'oriente dans un futur flou ; si cette girouette devient une ligne figée, il n'y a plus d'individu.

Que deviendrait l'individu, et sa conscience de soi, dans un monde où il peut directement percevoir le déterminisme absolu ?

Dans la nouvelle, suite à une pirouette physique un peu obscure, le présent est en contact avec le futur, ou plus exactement le futur peut parler au présent. Il est découvert que 1) il est physiquement impossible pour tout humain de changer le futur, ce qui expose l'individu à la réalisation du déterminisme absolu, mais 2), les messages que le futur envoie au présent sont en bonne partie des mensonges purs et simples, ce qui maintient l'illusion du libre arbitre. Greg Egan n'aborde pas ces questions avec l'angle qui m'aurait parlé le plus (les ravages psychologiques causés par le point 1), mais très bon néanmoins, hautement stimulant.

Eugène (4,5/5)

Vous vous souvenez de cette vieille nouvelle d'Asimov, ou le souhait le plus profond de la première IA est de mourir ? Ici, c'est la même histoire, mais avec des humains hyper intelligents. « Je ne vois aucune utilité à l'existence quand je peux faire tant en son absence. » Notons la peinture hautement réussie d'un couple tout à fait banal qui se retrouve à flirter avec l'exceptionnel.

La Caresse (4/5)

Un milliardaire esthète utilise son pouvoir et sa fortune pour reproduire dans le réel des œuvres fameuses, quitte à écraser et détruire froidement la vie d'autrui. C'est sombre dans la peinture de cette impunité, et en plus de l'horreur humaine, ce sont les idées accumulées qui donnent au récit son intérêt : les flics drogués pour réduire leur émotionnalité, l'algorithme qui trie les témoignages téléphoniques par probabilité, la chimère au cœur de la trame...

Sœurs de sang (2/5)

Cette fois, l'idée (des tests médicamenteux en triple aveugle qui donnent des placebos à des patients sans leur consentement et à très grande échelle) n'est pas suffisante pour compenser la trame très plate qui a été construite autour.

Axiomatique (5/5)

Celle-là m'avait beaucoup marqué il y a toutes ces années, lors de ma première lecture. Il y est encore question de libre arbitre, et d'implants qu'on peut acheter librement pour choisir ses propres opinions et croyances. Des nanomachines qui font quelques connexions dans le cerveau, et voilà, on croit telle ou telle chose. Greg Egan est revenu à cette idée dans Isolation, et c'est un thème récurrent chez Iain Banks comme ailleurs, mais cette démonstration est particulièrement dense et efficace. La personnalité comme simple état de la matière qui a la capacité de se changer elle-même. Reste à examiner ce qui pousse à se procurer un implant.

Le Coffre-fort (4,5/5)

La perspective de quelqu'un qui, depuis toujours, se réveille chaque jour dans un corps différent, le corps de gens qui réels, qui ont leur propre vie, et, eux, leur propre corps. Le narrateur essaie de comprendre sa condition, et va trouver le fin mot. Le seul problème narratif, c'est que le lecteur comprend instantanément la révélation que le narrateur met un peu de temps à accepter, mais c'est un détail : excellent et touchant.

Le Point de vue du plafond (4/5)

Il m'est déjà arrivé l'expérience extracorporelle précise qui arrive au narrateur : se voir d'au-dessus. Par contre, notre narrateur se retrouve obligé de vivre avec à long terme. On sent poindre le problème classique de Greg Egan : arriver à transformer l'idée en narration. Ici, il s'en sort, mais de justesse.

L'Enlèvement (4,5/5)

Une thématique habituelle pour Greg Egan : la conscience simulée, et les questions existentielles qui vont avec. Cette fois, c'est une histoire de chantage : et si la personne enlevée contre rançon n'est pas une "vraie" personne, mais une simulation créée pour l'occasion, une simulation qui ressent tout ce que l'authentique ressentirait ? Quels sont les devoirs éthiques envers cette personne simulée ?

En Apprenant à être moi (5/5)

On reste sur le même thème : depuis le plus jeune age, les humains se voient implantés un "cristal" qui apprend à copier et reproduire le fonctionnement du cerveau de l'individu et sa mémoire, jusqu'à ce que, avant que le cerveau charnel ne commence à décliner, celui-ci soit gentiment excisé afin de laisser le cristal prendre le relai. L'exercice de pensée est radical et ne laisse pas indifférent, d'autant plus que Greg Egan développe l'horreur psychologique d'une rupture entre la conscience charnelle et celle du cristal. Excellent. Il n'y a pas beaucoup d'auteurs qui jonglent aussi brillamment avec la nature de la conscience et parviennent ainsi à impacter le lecteur de façon durable.

Les Douves (3,5/5)

Encore une nouvelle qui est une idée transformée en narration d'une façon un peu forcée : les 0,0001 % seraient-ils secrètement en train de faire sécession du reste de la population en modifiant leur biologie de façon à rendre leur reproduction sexuelle impossible avec le commun, les transformant de facto en une espèce à part ? Malgré l'aspect artificiel de la narration, Greg Egan parvient à rester passionnant.

La Marche (4/5)

Celle-là est une variation sur exactement le même thème qu'Axiomatique, dans un contexte marrant : un tueur à gages fait avancer sa victime vers sa mort dans les bois tout en essayant de la convaincre de sa position philosophique marginale qui justifie l'innocence de son métier. Mais sa foi en cette position n'existe que grâce à un implant qu'il a choisi de s'implanter, et quelle meilleure façon de convaincre autrui que de convaincre de prendre l'implant ? Il ne s'agit donc pas de convaincre d'une idée, mais de convaincre de choisir une idée comme on choisit un plat au resto.

Le P'tit-mignon (4/5)

Envie d'avoir une progéniture, mais les chats ou les chiens ne sont pas un succédané suffisant ? Le p'tit-mignon est une option : un nourrisson bien basé sur vos gènes, et qui peut se développer aussi bien dans un utérus classique que dans le ventre d'un homme avec un peu d'aide, mais artificialisé pour ne développer aucune intelligence et mourir bien gentiment. Le parcours de cet homme qui décide d'en avoir un est déjà suffisamment glauque pour que le twist semble superflu : le choix d'avoir un p'tit-mignon, et le fait de l'aimer, est déjà une horreur qui se passe de twist.

Vers les ténèbres (5/5)

Nouvelle superbement illustrée par Manchu en couverture, elle rappelle fortement la première de ce recueil, L'assassin infini. Exactement de la même façon, on y suit la perspective de quelqu'un qui doit plonger jusqu'au cœur d'une zone où les lois de la physique sont radicalement et dangereusement changées. Les détails qui viennent étayer et rendre palpable ce désordre physique sont particulièrement nombreux et pertinents, aussi bien à l'échelle expérientielle de l'individu qui s'y plonge que, d'une façon plus large, à l'échelle de l'humanité qui tente de s'organiser pour faire face à cette menace récurrente. On sent là assez de matière pour construire un roman.

Un amour approprié (3,5/5)

Nouvelle visuellement marquante : une femme accueille dans son utérus le cerveau de son compagnon gravement blessé, pendant deux ans, en attendant qu'on lui fabrique un nouveau corps. Après tout, c'est la technique de conservation la moins chère et la compagnie d'assurance ne paiera pas autre chose. Il n'y a pas grand-chose de plus que cette situation, mais elle est explorée en détail.

La Morale et le Virologue (3,5/5)

Celle-là, je m'en souvenais : un cul béni fanatique façonne un virus fort mortel qui ne s'attaquerait que aux « adultères et sodomites ». On comprend rapidement son projet et la nouvelle traine un peu, mais ça reste marrant. Enfin, sombrement marrant.

Plus près de toi (3/5)

Une continuation de En Apprenant à être moi. Profitant de leur immortalité, les humains expérimentent d'autres corps, et autres expériences permises par le cristal, mais ça ne suffit pas au protagoniste, qui est obsédé par l'idée de savoir ce que c'est que d'être quelqu'un d'autre. Avec sa compagne, il va se livrer à une expérience de fusion de l'esprit. Il aurait pu se douter des conséquences.

Orbites instables dans la sphère des illusions (5/5)

Une vision hautement frappante pour conclure le recueil : les religions comme des bassins d'attraction qui attirent de force les humains comme un trou noir piège la lumière. Un beau jour, les mèmes que sont les religions et autres croyances sont devenus contagieux, et après quelques jours de chaos, certains ont atteint une masse critique à laquelle il est impossible d'échapper. Et pourquoi vouloir y échapper ? C'est enfin l'occasion de vivre dans la certitude. Sauf pour une minorité de marginaux qui existent dans la frontière perpétuellement mouvante des sphères d'attraction, effleurés par les idéologies mais parvenant à éviter la zone de non-retour. A moins que... Le doute est-il sa propre idéologie qui piège autant que les autres ? « Peut-être que nous avons été capturés par ce que tu appelles liberté. » De la part de Greg Egan, il ne s'agit évidemment pas d'un relativisme culturel qui dirait qu'au fond, tout se vaut (idée atroce), mais d'une évocation saisissante de l'idée de mème et de l'illusion du libre arbitre.

mercredi 17 avril 2024

Biologie de Campbell #9 - La respiration cellulaire et la fermentation

Biologie de Campbell #9 - La respiration cellulaire et la fermentation

Là, je crois que j'arrive à un chapitre où je vais devoir simplifier un peu mes notes, ne serait-ce que pour des raisons purement pratiques de mise en page : ça se densifie sacrément en formules chimiques. C'est de loin le chapitre le plus difficile jusqu'ici. Je fais donc l'impasse sur de nombreuses pages qui détaillent les processus de la respiration cellulaire, dont on voit un aperçu ci-dessus.

LES VOIES CATABOLIQUES GÉNÈRENT DE L'ÉNERGIE EN OXYDANT DES MOLÉCULES ORGANIQUES

Rappel : les voies cataboliques sont des voies métaboliques qui libèrent l'énergie emmagasinée en dégradant des molécules complexes. Le transfert d'électrons à partir de molécules de combustible (comme le glucose) y joue un rôle clé.

Les composés organiques possèdent une énergie potentielle qui résulte de la dispersion des électrons dans les liaisons entre leurs atomes. A l'aide d'enzymes, la cellule dégrade des molécules organiques complexes, riches en énergie potentielle, et les transforme en produits résiduels plus simples renfermant moins d'énergie. Une partie de l'énergie tirée des réserves chimiques sert à accomplir du travail et le reste se disperse en chaleur.

La fermentation dégrade le glucose ou d'autres combustibles biologiques, en l'absence d'O₂

La voie catabolique la plus répandue et la plus efficace est la fermentation cellulaire aérobie :  ses réactifs sont l'O₂ et les combustibles organiques.

Certaines cellules procaryotes utilisent comme réactif des substances autres que l'O₂ : c'est la respiration anaérobie.

Ici, comme c'est communément le cas, le terme respiration cellulaire concernera les processus aérobies.

Un résumé de la respiration cellulaire :

composés organiques + molécules d'oxygène

 ↓

molécules de dioxyde de carbone + eau + énergie

Les glucides, les lipides et les protéines peuvent tous servir de combustibles après avoir été transformés. L'amidon représente une importante source de glucides pour les animaux : c'est un polysaccharide de réserve qui peut être dégradé en sous-unités de glucose (C₆H₁₂O₆). La dégradation du glucose sera l'exemple utilisé pour décrire la respiration cellulaire :

C₆H₁₂O₆ + 6 O₂ → 6 CO₂ + 6 H₂O + énergie (ATP & chaleur)

La respiration cellulaire participe donc aux processus cellulaires vitaux en alimentant la synthèse de l'ATP. La dégradation du glucose est exergonique (les produits de la réaction chimique renferment moins d'énergie que les réactifs et la réaction peut se produire spontanément).

Dans beaucoup de réactions chimiques, un ou plusieurs électrons (e⁻) passent d'un réactif à un autre. Ces transferts sont appelés réactions d'oxydoréduction (ou réactions rédox) : la perte d'électrons correspond à l'oxydation, et le gain d'électrons à la réduction. Attention : c'est l'ajout d'électrons qui s'appelle réduction ; quand ils s'ajoutent à un cation, les électrons, charges négatives, réduisent la quantité de charges positives du cation.

Par exemple, la réaction dans laquelle du sel de table se forme à partir de sodium et de chlore :

Na + Cl → Na⁺ + Cl⁻

Na est oxydé (perd un électron)

Cl est réduit (gagne un électron)

On peut généraliser comme suit les réactions d'oxydoréduction, où X est oxydé et Y est réduit :

Xe⁻ + Y→ X + Ye

  • Ici, Xe⁻ est agent réducteur : c'est le donneur d'électron
  • Y est l'agent oxydant : c'est l'accepteur d'électron qui oxyde X en lui enlevant son électron

Comme il doit y avoir un donneur et un accepteur, oxydation et réduction vont toujours de pair.

Certaines réactions d'oxydoréduction ne font que modifier le degré de la mise en commun des électrons dans la liaison covalente, par exemple dans la combustion du méthane : dans les produits, les électrons passent plus de temps à côté des atomes d'oxygène à cause de leur électronégativité. Étant donné sa forte électronégativité, l'O₂ figure parmi les agents oxydants les plus puissants. Plus un atome est électronégatif, plus il attire les électrons et plus il faut d'énergie pour en éloigner un électron. Un électron perd de l'énergie potentielle quand il va d'un atome faiblement électronégatif vers un atome fortement électronégatif (comme un ballon qui roule vers le bas d'une pente). Donc une réaction d'oxydoréduction qui rapproche les électrons des atomes d'oxygène, comme la combustion (oxydation) du méthane, libère de l'énergie chimique pouvant servir à produire du travail.

Revenons à la respiration cellulaire :

C₆H₁₂O₆ + 6 O₂ → 6 CO₂ + 6 H₂O + énergie

C₆H₁₂O₆ est oxydé en 6 CO₂

 6 O₂ est réduit en 6 H₂O

Comme pour la combustion du méthane et de l'essence, il y a oxydation du combustible (le glucose) et réduction de  l'O₂ ; à cette occasion, les électrons perdent de l'énergie potentielle et de l'énergie est libérée.

En général, les molécules organiques riches en hydrogène sont d'excellents combustibles, car leurs liaisons renferment des électrons à forte énergie potentielle, susceptibles de se rapprocher des atomes d'oxygène et de libérer de l'énergie. Les principaux nutriments énergétiques (glucides et lipides) sont des réservoirs d'électrons associés à de l'hydrogène, et seule la barrière formée par l'énergie d'activation empêche un raz-de-marée d'électrons tendant à adopter l'état énergétique le plus bas. Ce sont les enzymes qui détruisent cette barrière d'une façon contrôlée par l'organisme. Comme c'est souvent le cas dans les réactions d'oxydation, chaque électron se déplace avec un proton, soit sous la forme d'atome d'hydrogène. 

(C'est à partir d'ici qu'on arrive à des processus chimiques complexes qui détaillent la respiration cellulaire : je ne vais pas rentrer dans les détails.)

La molécule NAD⁺ est un transporteur d'électron : la plupart des électrons retirés des nutriments sont d'abord transférés au NAD⁺, formant du NADH par réduction. Le second proton retiré des nutriments est libéré dans la solution. Il existe ainsi une chaine de transport des électrons qui échelonne la "descente" des électrons en une série d'étapes et emmagasine une partie de l'énergie libérée sous forme d'ATP, le reste étant libéré sous forme de chaleur. En somme, l'O₂ attire à lui les électrons de la chaine de transport dans une cascade énergétique contrôlée :

nutriment → NADH → chaîne de transport d'électrons → O₂

Les étapes de la respiration cellulaire sont :

  1. La glycolyse : dégradation du glucose. D'abord une phase d'investissement d'énergie, où la cellule dépense de l'ATP, puis une phase de libération d'énergie, où elle récolte ses dividendes. Libère juste une petite partir de l'énergie chimique contenue dans le glucose (2 molécules d'ATP). La suite de l'oxydation du glucose se passe dans la mitochondrie.
  2. L'oxydation du pyruvate et le cycle de l'acide citrique.
  3. La phosphorylation oxydative produit la majeure partie de l'ATP.

L'un des rôles de ces processus est de transformer l'énergie contenue dans une molécule de glucose en de nombreuses sous-unités d'énergie qui peuvent être utilisées de façon précise et ciblée.

La phase finale de la création de l'ATP se déroule dans des complexes protéiques appelés ATP synthase qui sont enchâssés dans la membrane de la mitochondrie. Il est frappant à quel point ce complexe évoque une machine avec rotor mis en rotation par les ions H⁺, rotor qui fait tourner une tige interne qui active des sites catalytiques.

Chaque molécule de glucose peut libérer entre 30 et 32 molécules d'ATP. C'est environ 34% de l'énergie chimique potentielle transférée à l'ATP. C'est mieux qu'un bon moteur de voiture qui ne convertit que 25% de l'énergie contenue dans l'essence. Le reste de l'énergie du glucose se perd sous forme de chaleur.

LA FERMENTATION ET LA RESPIRATION ANAÉROBIE

En l'absence d'O₂, très électronégatif, qui attire les électrons vers le bas de la chaine, la phosphorylation oxydative cesse. Certaines cellules peuvent oxyder leur combustible organique et générer de l'ATP sans utiliser d'O₂, via la fermentation et la fermentation cellulaire anaérobie. La respiration anaérobie fait appel à une chaine de transport d'électrons, contrairement à la fermentation.

Certaines bactéries utilisent d'autres accepteurs d'électrons à la place de l'O₂ à la fin de leur chaine respiratoire, comme l'ion sulfate. La travail de la chaine accumule une force protonmotrice qui sert à produire de l'ATP, mais le sous-produit de l'opération est du sulfure de dihydrogène plutôt que de l'eau (odeur d'œuf pourri). D'autres bactéries utilisent le CO₂ comme accepteur final d'électron.

La fermentation, elle, est un prolongement de la glycolyse : une glycolyse à laquelle s'ajoutent des réactions qui régénèrent le NAD⁺ en transférant les électrons du NADH au pyruvate ou à ses dérivés.

Dans la fermentation alcoolique, le pyruvate est converti en éthanol. C'est le cas des levures qui produisent le levain et le vin par exemple.

Dans la fermentation lactique, le pyruvate se fait réduire directement par le NADH : du lactate est ainsi formé. Ce sont des levures et des bactéries qui forment le formage et le yaourt.

Je passe les détails des réactions, mais c'est le même principe : des réactions chimiques où des électrons sont transférés pour produire de l'ATP avec en prime création de sous-produits (éthanol et lactate).

Les cellules humaines produisent de l'ATP par fermentation lactique quand l'O₂ vient à manquer, par exemple dans un effort intense, quand le catabolisme des glucides pour produire de l'ATP se fait plus rapide que l'apport d'O₂ nécessaire aux muscles. Dans l'heure qui suit, le sang transporte le surplus de lactate ainsi produit jusqu'au foie où les cellules hépatiques le reconvertissent en pyruvate. Comme de l'O₂ est alors disponible, le pyruvate peut alors pénétrer dans les mitochondries des cellules hépatiques et y poursuivre sa dégradation aérobie.

Contrairement à la fermentation, dans la respiration cellulaire, le pyruvate est complètement oxydé dans la mitochondrie.

C'est pourquoi la respiration cellulaire produit beaucoup plus d'ATP par molécule de glucose que la fermentation : jusqu'à 32 molécules d'ATP contre 2 molécules d'ATP produites par fermentation.

Certains organismes sont des anaérobies stricts : ils ne pratiquent que la fermentation ou la respiration anaérobie. Ils sont incapables de survivre en présence d'oxygène. 

D'autres organismes, comme les levures et de nombreuses bactéries, sont des anaérobies facultatifs : ils peuvent produire assez d'ATP pour survivre en utilisant la fermentation ou la respiration, comme nos cellules musculaires.

De rares types de cellules, comme celles du cerveau des vertébrés, s'en tiennent strictement à l'oxydation aérobie du pyruvate.

DE NOMBREUSES AUTRES VOIES MÉTABOLIQUES ET ANABOLIQUES

Il y a d'autres combustibles de la respiration cellulaire que le glucose. Par exemple, pour l'humain : lipides, protéines, saccharose, polysaccharides comme l'amidon...

La glycolyse s'effectue à partir d'une grande variété de glucides : l'organisme a tendance à transformer, notamment via la digestion, cette variété de glucides en glucose pour la respiration cellulaire. Les protéines, elles, doivent être dégradées en leurs acides aminés constituants : un bon nombre servent à fabriquer de nouvelles protéines, mais des enzymes convertissent l’excédent en intermédiaires de la glycolyse et du cycle de l'acide citrique. Le catabolisme peut aussi extraire l'énergie stockée dans les lipides via une série de conversions. L'essentiel de l'énergie des lipides se trouve dans les acides gras. Ceux-ci sont dégradés en fragments contenant deux atomes de carbones au cours de la bêta-oxydation.

La biosynthèse (voies anaboliques) : les molécules organiques de la nourriture ne sont pas toutes destinées à l'oxydation et à la synthèse de l'ATP : la nourriture doit fournir aux cellules non seulement des kilojoules, mais aussi les chaines carbonées indispensables à la fabrication de leurs molécules.

Certains monomères organiques issus de la digestion peuvent être utilisés directement, comme les acides aminés provenant de l'hydrolyse des protéines alimentaires peuvent servir de monomères dans la synthèse des protéines de l'organisme. D'autres monomères servent de précurseurs à la synthèse de molécules indispensables. Le corps humain ne peut synthétiser ainsi que la moitié des 20 acides aminés, l'autre moitié doit donc provenir directement de la nourriture.

La biosynthèse ne produit pas d'ATP, elle en consomme.

La cellule ne gaspille pas d'énergie à produire plus d'une substance qu'il ne lui en faut. Cette régulation repose principalement sur un mécanisme de rétro-inhibition : le produit terminal de la voie anabolique inhibe l'enzyme qui catalyse la première étape de cette voie.

La cellule gère aussi son métabolisme par rétro-inhibition : la vitesse de la respiration cellulaire, et donc de la génération d'ATP, augmente ou diminue en fonction de l'effort demandé à la cellule. La régulation porte principalement sur l'activité d'enzymes intervenant en des points stratégiques de la voie catabolique.

Rappel : l'énergie qui nous maintient en vie est libérée et non pas produite par la respiration cellulaire.

Nos cellules extraient l'énergie que la photosynthèse a préalablement stockée dans la nourriture.

mercredi 10 avril 2024

The Empty - Ray Nayler (et autres nouvelles du recueil Protectorats)

The Empty - Ray Nayler (et autres nouvelles du recueil Protectorats)

Les diverses nouvelles de Ray Nayler que j'évoque ci-dessous ont été lues en version originale sur son site, et je crois que plusieurs d'entre elles font partie du recueil Protectorats paru récemment au Bélial. Il m'en reste à lire, sur son site, et je m'y collerai peut-être.

The case of the blood-stained tower (3,5/5)

Une histoire fort simple, mais c'est l'enrobage qui fait tout. A une époque indéterminée dans le monde arabe, le narrateur devient scribe pour une sorte de Sherlock Holmes local. Une mort suspecte, une enquête, une résolution ouverte, etc. En soi, rien de dingue. Mais le contexte exotique, développé par une écriture élégante qui parvient aussi à créer instantanément des personnages forts et attachants, rend l'ensemble agréable. L'auteur esquisse en arrière-plan tout un monde de mystères potentiellement science-fictifs, et ça ne m'étonnerait pas qu'il y revienne.

The Empty (5/5)

Dans un futur proche, l'automatisation a éradiqué une bonne partie des emplois humains. La narratrice, chanceuse, a pour boulot de gérer en même temps vingt convois automatisés qui traversent le grand centre vide des USA. J'apprécie particulièrement certains détails, comme le fait que le conglomérat qui l'emploie, au lieu d'avoir de bons vieux bureaux, se contente de louer de vieux parkings abandonnés dans des coins paumés et d'y mettre des préfabriqués, en plus de mélanger toutes ces bases mobiles et les employés qui s'y trouve tous les trois mois pour éviter tout lien entre les gens. Bref, la narratrice est confrontée à un problème sur un de ses convois, et va devoir utiliser des drones pour tenter de résoudre la situation. Problème : potentiellement une vie à sauver, au prix des critères d'efficacité et des bons points qui vont avec. L'auteur parvient à rendre l'horreur de cette situation, où la plupart des gens fermeraient les yeux et penseraient à leur promotion. Mais notre narratrice choisit l'autre voie. Elle sauve une vie, certes, mais à un fort prix pour elle-même, à cause du cynisme de ses employeurs et de l'idéologie de la tyrannie de l'efficacité. Punie pour une bonne action. Tragique et pertinent.

Mender of Sparrows (2/5)

Cette fois, il est question d'androïdes, un poncif de la SF. Ca se lit bien, l'écriture reste bonne, mais aussi bien sur le plan de la trame que des idées, il n'y a rien de grand intérêt. Les androïdes sont une minorité oppressée, on s'interroge très vaguement sur la nature de la conscience : du plus que déjà vu. 

The Disintegration Loop (2/5)

J'ai l'impression de commencer à discerner un motif. Ray Nayler excelle pour ce qui est du worldbuilding, mais ses trames sont extrêmement simplistes. Ici, uchronie : les USA ont récupéré plein de cool tech dans une soucoupe volante crashée, notamment le disintegration loop, qui permet de lire certaines mémoires des morts. S'ensuit une brève enquête policière avec un twist classique. L'auteur parvient à donner l'impression qu'il y a plein de choses en arrière-plan, et ce n'est pas faux : on trouve plein de détails qui attisent la curiosité et donnent envie de lire. Mais la trame en elle-même tient en deux phrases et il n'y aucune exploration satisfaisante des thèmes esquissés.

A Rocket for Dimitrios (2,5/5)

Une suite à la nouvelle précédente, meilleure car présentant plus d'enjeux et une trame plus en lien avec le worldbuilding. Il me semblait qu'un dilemme moral était mis en place (faut-il autoriser les USA ou même le monde à récupérer la boite de Pandore qu'est une autre soucoupe volante crashée ?), mais non, cette piste est complètement désamorcée au profit d'un peu de mélodrame à propos de ce Dimitrios. Pour le reste, c'est du policier typé espionnage classique avec beaucoup trop d'exposition.

Eyes of the Forest (4/5)

Une nouvelle très chouette sur une planète où toute la faune et la flore vit en symbiose. Tout ce qui est vivant luit, et vit en relative harmonie, alors que tout ce qui est mort perd sa lueur et se fait instantanément dévorer par toutes les bestioles qui attendent cette opportunité. Au milieu de ça, les humains vivent en souterrain, pendant qu'une caste de pisteurs maintient le lien entre les colonies en naviguant à la surface à l'aide d'une combinaison lumineuse. La trame est une fois de plus très fine mais les dernières lignes parviennent néanmoins à nouer le tout. Je reproche juste à la nouvelle de nous faire poiroter beaucoup trop longtemps avant de nous faire rentrer dans son sujet : le premier tiers, en mode flashback, est franchement superflu.

Father (4/5)

Une trame simple et pas follement originale, mais fort bien menée. Dans le contexte post-WW2 uchronique déjà croisé plus haut, un fils unique voit apparaitre dans sa vie un robot-père, qui va rapidement gagner et mériter son affection. Ce conte de fée sera hélas plus qu'entaché par les sombres secrets que cachent ces robots-pères et, surtout, par l'inévitable perversité humaine. L'auteur parvient à donner à cette situation resserrée un habile tragique du quotidien.